Réflexions
relatives aux conclusions de l’Avocat général Saugmandsgaard Øe, dans les
affaires jointes C-231/15 Tele2Sverige AB/Post-och telestyrelsen et C-698/15
Secretary of State for Home Department/Tm Watson e.a.
La spectaculaire annulation, intégrale et
rétroactive, de la directive 2006/24/CE, « rétention des données de
communications électroniques », par la Cour de justice de l’UE dans la
désormais célèbre affaire Digital Rights
Ireland Ltd (C-293/12 et C-594/12, 8 avril 2014) provoque, plus de
deux ans après, de nouvelles conséquences, importantes et riches de
potentialités.
Ce sont les conclusions de l’Avocat
général Saugmandsgaard Øe, dans les affaires jointes C-231/15 Tele2Sverige
AB/Post-och telestyrelsen et C-698/15 Secretary of State for Home Department/Tm
Watson e.a., qui fournissent aujourd’hui matière à réflexion.
La directive annulée dans l’affaire Digital Rights Ireland (DRI), on s’en souvient, organisait la
rétention des données de connexion par les opérateurs de télécommunications ou
les fournisseurs d’accès à internet, permettant ainsi aux autorités nationales
de les utiliser dans le cadre de la lutte contre le terrorisme ou la
criminalité grave. La Cour avait jugé la rétention de telles métadonnées comme
constituant une ingérence particulièrement grave dans le respect des droits
consacrés aux articles 7 (protection de la vie privée) et 8 (protection des
données à caractère personnel) de la Charte des droits fondamentaux de l’UE.
C’est l’absence de garanties entourant la mise en œuvre de la directive qui
l’avait conduite à l’invalidation de cette dernière, suite au contrôle de
proportionnalité de l’ingérence dans les droits fondamentaux des individus par
rapport à la nécessité de celle-ci, dans une société démocratique, pour assurer
le respect d’un objectif d’intérêt général (à savoir ici la lutte contre le
terrorisme et la criminalité grave).
Les deux affaires sur lesquelles l’Avocat général Øe
s’est prononcé le 19 juillet, portaient sur l’obligation générale imposée aux
fournisseurs de services de télécommunications, en Suède et au Royaume-Uni, de
conserver les données relatives aux communications électroniques. Saisie par voie
préjudicielle par des juridictions d’appel suédoise et britannique, la CJUE est
invitée à répondre à la question de savoir si les régimes nationaux qui
imposent aux fournisseurs une obligation générale de conservation des données
sont compatibles avec le droit de l’Union. Elle est par la même appelée à
préciser l’interprétation à apporter
dans un contexte national à l’arrêt DRI.
La solution proposée par l’Avocat général est loin
d’être surprenante mais recèle néanmoins d’importantes précisions, qui entrouvrent
peut-être une porte inattendue, nous y reviendrons.
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